Interview d'Augusto Vitale à Expogrow Irún 2015

Important psychologue, socio-annaliste et professeur de la Faculté de Psychologie de l’Université de la République, Augusto Vitale nous décrit la situation du cannabis en Uruguay depuis sa légalisation en 2013.

Transcription de l'entrevue avec Augusto Vitale:

Bonjour, nous sommes sur le forum d’Expogrow d’Irun 2015 avec Augusto Vitale. Comment allez-vous Augusto ? Comment s’est passée la conférence ?

Bien, très bien, merci beaucoup. Grâce à l’expérience Uruguayenne actuelle nous faisons partie d'une équipe qui développe l’implantation de la loi de régulation et de contrôle du marché du cannabis.  

L’année passée nous avons reçu ici-même Julio Calzada, nous avons pu parler avec lui et il nous avait expliqué un peu la situation du cannabis en Uruguay. Comment les choses ont-elles évolué depuis ?

Ça a été un vrai défi après l’adoption de la loi. Il a fallu donner les capacités institutionnelles et opératives à l’institut qui a créé la loi, c'est-à-dire l’institut de régulation et de contrôle du cannabis qui intègre également le secrétaire des drogues en Uruguay, dont Julio a été secrétaire général, mais également le ministère de santé publique, le ministère du développement social, et celui de l’agriculture.

Tout cela représente l’assemblée directive et avec les équipes techniques de ces ministères... le défi a été de résoudre les aspects pratiques des implémentations : la façon de créer les registres, où doivent aller les utilisateurs pour s’inscrire, ils vont dans les bureaux de poste locaux, dont on peut trouver des agences un peu partout dans le pays, et ils doivent choisir l’une des trois modalités d’accès : l’utilisation à domicile, l’auto-culture à domicile, les clubs de cannabis, mais également quelque chose qui n’est pas encore en place aujourd’hui, la dispense en pharmacie.

Et ensuite le règlement pour l’utilisation, l’utilisation médicale, l’utilisation industrielle du chanvre, tout ça a représenté un grand défi pour mettre en marche ce qu’on pourrait appeler une institution, en espérant qu’un budget suffisant lui soit assigné.

Nous l’espérons ! Comment pourrait-on comparer la situation actuelle en Uruguay ou en Amérique du Sud avec ce qui se passe en Europe ? 

En réalité, nous avons appris beaucoup de choses sur la réduction des risques grâce à l’expérience Européenne.

Surtout durant une décennie pendant laquelle vous avez pu travailler avec des sujets comme l’héroïne, le VIH et les maladies contagieuses, de plus, nous avons pu avoir la réponse à certaines questions grâce aux réflexions qu’il y a eu ici, bien avant le débat en Uruguay.

A présent, je crois que les défis sont communs. En effet je pense que nous avons une expérience concrète à apporter, en ayant décidé politiquement comme ce fut le cas durant l’administration précédente, et en soutenant à présent la loi, d’une politique ferme qui donne de la cohérence à quelque chose que le cadre juridique ne condamnait pas, qui était l’utilisation personnelle de substances psychoactives n’affectant pas de tierce personne.

Nous pensons donc avoir l’expérience nécessaire à apporter, mais l’Europe peut également donner des conseils sur les meilleures façons d'appliquer certaines politiques qu’ils développent depuis de nombreuses années, dans certains cas.

S’il y avait un peu de synergie entre les deux continents cela serait très bien, effectivement.

Et pour les prochaines années, vous vous attendez à quoi en général ?

J’espère que le débat sur les politiques des drogues continuera à avancer comme c’est le cas en ce moment et que l’hypocrisie actuelle présente dans de nombreuses politiques sera abandonnée.
Ces mêmes sociétés qui tolèrent l’utilisation, mais qui ne souhaitent pas être justes dans l’application de la normalisation totale, avec des règles.

Il ne s’agit pas d’une libération de toutes les drogues, mais il s’agit de mettre des règles en accord avec les dynamiques, les risques et les dégâts de chaque substance, comme c’est déjà le cas avec l’alcool, ou le tabac qui sont d’autres drogues. Effectivement il existe bien un début, ces drogues sont des portes d'entrées pour nos populations les plus jeunes, cependant je crois que nous devons être plus cohérents et ne pas appliquer des règles pour certaines et pas pour d'autres, sans perdre de vue la décriminalisation des utilisateurs, bien entendu.

Augusto, vous souhaitez ajouter quelque chose pour la communauté cannabique ?

Et bien, pour nous il est très important que la société civile et les mouvements eux-même, nous offrent l’ouverture pour le dialogue et pour qu’ils nous aident à continuer le débat sur l’amélioration des politiques des drogues.

Je suis un technicien avec des engagements politiques, mais j’ai également participé activement
à certains autres moments de l’histoire, durant lesquels il était important et fondamental que les mouvements sociaux fassent entendre leur voix et qu’ils mettent ces sujets sur la table des débats, en exigeant des politiques qu’ils s’occupent de ces sujets et que... 

Il faut beaucoup de courage et ne pas oublier que nous sommes d’une certaine façon connectés.

Merci beaucoup pour votre travail, nous en avons réellement besoin et bonne chance pour le futur.

Merci à vous.

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