Interview Martín Barriuso 2016 Partie 3/3

Troisième partie de interview de l’activiste cannabique Martín Barriuso, fondateur du CSC Pannagh inauguré en 2003. Il revient sur la situation des clubs par rapport à la loi mais aborde également le futur des CSC en Espagne.

interview Transcription avec Martin Barriuso 2016 Partie 3/3


Quelle est la situation actuelle? Quel va être le processus que vous allez suivre à partir de maintenant pour continuer à lutter? Comment expliquerais-tu le déroulement?

Bon, le processus je pense qu’on en a déjà parlé plus ou moins. Pour le moment nous sommes condamnés par le Suprême, mais nous avons présenté ce qui s’appelle une procédure d’annulation, car nous savons que dans cette peine plusieurs de nos droits institutionnels ont été bafoué.

Le Suprême doit traiter la procédure d’annulation. Cela tardera plusieurs mois, si la sentence est ratifiée elle deviendra définitive, ce qui est le plus probable.

Je ne pense pas qu’ils vont reconnaitre qu’ils se sont trompés et qu’ils ont bafoué nos droits, cela me surprendrai beaucoup.

Ce serait étonnant, en effet!

Ce serait génial ! Il faudrait les féliciter, mais je doute fortement que cela se produise.

A partir de ce moment la sentence sera définitive et il faudra que l’audience qui nous a jugé décide de l’exécution de la peine, mais comme nous allons recourir au Tribunal Constitutionnel et même au Tribunal des Droits de l’Hommes de Strasbourg si nécessaire, il existe la possibilité de demander que la peine soit suspendue et que la contravention soit annulée, et que tout cela reste en suspend.

Après le recours au constitutionnel, si ils ratifie la condamnation ou s’ils nous condamnent une fois de plus, nous pourrions demander la grâce, ce que nous n’hésiterons pas à faire, et nous pourrions alors aller à Strasbourg.

Nous sommes donc à présent dans cette phase. Réunir de l’argent pour pouvoir payer la défense, parce qu’il faut continuer à payer les avocats, les procureurs, etc.

C’est une dépense importante j’imagine, ça doit être compliqué à gérer.

Oui, oui, même si nous avons de nombreux soutien.

Comment vous gérez ce soutien? Ou allez vous le chercher? Quel est plus ou moins votre plan de travail?

On demande de l’argent aux gens du secteur cannabique, aux entreprises, fondations, organisations, pour qu’il nous donne un coup de main.

Nous ne voulons pas commencer a demander de l’argent pour payer la contravention, à moins que nous n’ayons pas d’autres options.

Je me sens un peu comme si j’avais été kidnappé par Al-Qaeda et qu’il fallait payer la rançon, avec une cagoule en train de crier avec un couteau sur ma gorge pour qu’on lui envoie l’argent.

Je demande donc instamment à nos collègues, amies et amis de ne pas payer la rançon. Nous allons essayer de nous libérer, nous allons faire tomber les murs de cette prison dans laquelle ils nous ont enfermés.

Nous refusons de donner de l’argent à un état qui ne respecte pas nos droits, qui viole ses propres principes constitutionnels, qui ne nous offre aucune sécurité judiciaire et qui nous traite comme des moins que rien.

A quoi bon avoir fait les choses de la façon la plus légale possible alors ?

Nous avons été voir les institutions, nous avons agît avec transparence, nous avons payé des impôts, mais cela n'a servie à rien, ils nous attaquent encore plus fort.

Si nous avions fait du trafique et si nous avions eu de l’argent caché dans une planque, avec le cannabis planqué quelque part
ils auraient eu beaucoup plus de mal à nous interpeller et la peine aurait été moins importante.

C’est donc notre confiance dans l’état de droit, notre décision d’être transparent, de ne rien cacher et d’expliquer clairement ce que nous faisons qui ont provoqué cette attaque encore plus fort. Nous allons donc essayer principalement d’obtenir des soutient au niveau des institutions.

Normalement le parlement Basque doit approuver une proposition de loi nous soutenant et doit ratifier sa stratégie de régulation.

Nous allons présenter des motions et des propositions de loi devant les parlements autonomes, les gouvernements provinciaux, les mairies, tous les endroits possibles. 

Nous allons continuer à lutter au parlement espagnol, parce que si tout cela est la faute du PP et du PSOE, qui n’ont fait aucune réforme du code pénal pour en finir avec l’insécurité judiciaire durant plus de trente ans à gouverner, si le Suprême interprète de cette façon le Code pénal, c’est parce qu’il est ambigu et facilement interprétable.

La balle est donc dans le camp du Parlement, car ce sont les politiques que nous avons eu durant toute cette étape démocratique qui n’ont pas fait leurs devoirs et qui laissent à présent le travail au Suprême.

Je crois que l’Espagne est pionnière dans ce domaine, et bon, il y a cette régulation responsable qui est un exemple unique au niveau Européen, pour la synchronisation entre les organisations afin de transformer et obtenir un changement législatif.

Parle-moi du manifeste que vous avez publié en relation avec tout ca. 

Nous avons publié un manifeste, on récupère des adhésions,
on va peut être renouveler le site web sur lequel nous regroupons des signatures pour donner un coup de fouet.

Il s’agit d’un manifeste dans lequel nous expliquons que PANAGH est une association, que c’est ce qui a été démontré durant le jugement, que nous sommes réellement une association, une association sans but lucratif, d’utilisateurs de cannabis, que notre activité a été public et notoire et que nous ne nous sommes jamais caché.

Nous avons toujours lutté pour la régulation et tout ça, c’est dans la presse, il y a les résolutions judiciaires, c’est donc clairement évident que nous ne nous sommes pas caché.

Et en plus vous n’êtes pas seul, non ? Une bonne partie de la population prend conscience petit à petit et souhaite participer. Comment les gens peuvent-ils faire pour participer davantage, les gens qui ne font pas partie du secteur, les consommateurs, les utilisateurs, que peuvent-ils faire en plus d’appuyer le manifeste pour vous aider, ou pour aider l’activisme?

Pour aider l’activisme ? Et bien, qu’ils s’inscrivent dans une association.

Ils souhaitent en finir avec les associations, c’est donc le moment idéal pour s’inscrire et protéger les gens qui y sont déjà inscrit,
ceux qui ont servi de porte parole et les représentants. Ils veulent nous couper la tête les uns après les autres, quand quelqu’un agresse une personne de ton groupe, de ta bande, il faut être uni, soudé, pour qu’ils ne viennent plus chercher des problèmes.

Oui, ne pas donner l’impression de n’être que quelque uns, mais montrer que c’est sérieux, Nous ne rentrerons pas chez nous, nous n’abandonnerons pas, nous avons le droit de faire ce que nous faisons.

La consommation de cannabis ou de n’importe quelle autre substance est une question absolument personnelle.

Donc du moment que nous ne faisons de mal à personne, on ne devrait pas pouvoir nous créer de problème.

Nous devons avoir le droit d’avoir notre propre système d’approvisionnement en marge du marché illégal.

Nous ne pouvons pas le faire dans les grandes associations et de façons professionnelles parce que le Suprême ne le permet pas?

Et bien nous devrons donc reformer nos associations, créer des associations de 15, 20, 30 personnes qui se connaissent réellement
et qui partage les tâches.

Nous éviterons la professionnalisation excessive, nous changerons de modèle, mais nous continuerons à cultiver, nous continuerons à nous organiser et nous continuerons à lutter, c’est ce que veulent empêcher ces gens là.

L’Espagne à connue un grand changement social au niveau du cannabis.

Le changement politique arrive en sens inverse, la société a changée, la perception du cannabis a changée, la manière de se positionner avec le cannabis a changée.

La société accepte de plus en plus le fait qu’il s’agisse d’une plante qui possède ses risques évidemment, mais pas plus que d’autres choses avec lesquelles nous vivons.

La meilleure chose que nous puissions faire en ce moment c’est ne pas nous laisser abattre, ne pas avoir peur, nous sommes entrain de gagner, nous gagnons la bataille des idées, au niveau des régions et sur le plan international.

Avec ce vote, l’Uruguay se positionne à l’avant-garde sur le plan international. Avec la majorité officielle le sénat a approuvé ce mardi la loi régulant la production et la vente de cannabis sous contrôle de l’État, une initiative proposée par le président de gauche José Mújica, qui va plus loin que n’importe quelle législation existante, durant le long débat, les sénateurs du Frente Amplio ont défendu le projet comme une façon d’affaiblir le marché du narcotrafique comme une partie des lois impulsées par la gauche au pouvoir depuis 2005.

Cela s’inscrit également dans la dépénalisation de l’avortement,
le mariage pour tous et dans de nombreuses actions et lois que nous avons voté pour avancer …

Qu’est ce que signifie pour toi « Growing Happiness », qu’est ce qui te permettrait d’être plus heureux maintenant?

De nombreuses choses. Je suis plutôt heureux, mise à part toutes ces histoires.

Personnellement, ce qui m’a vraiment apporté du bonheur, c’est la quantité de soutien que nous avons reçu, quand ils nous ont communiqué la sentence, tu peux imaginer que nous avons pris peur, et quand c’est devenu publique, il y a eu une telle réaction,
il y a eu une avalanche de soutiens qui m’ont rendu immensément heureux.

Je ne sais pas se qui ce passera à partir de maintenant, mais je crois que le plus difficile est derrière nous. Les gens se sont rendu compte que les choses doivent changer et qu’il faut se bouger. Je crois que les choses vont finir par changer, je serais alors très heureux le jour ou tout cela sera concrétisé par une loi.

Qu’ils changent le code pénal et plus. Je crois que nous sommes sur la bonne voie, et que c’est ce que nous devons poursuivre, qu’ils ne nous empêchent pas d’être heureux.

Pour ma part, c’est une des choses que j’ai eu très clair en tête depuis le début, même avant de connaitre la sentence, ma femme et moi avons fait une super fête à la (mauvaise) santé du Suprême, en pensant cela justement, ils peuvent nous retirer notre argent, la maison, ou n’importe quoi d’autre, mais la bonne humeur, l’envie de lutter et surtout les arguments que nous avons, tout ça, ils ne pourront pas nous l’enlever et je crois que la meilleure chose que nous puissions faire, c’est continuer à être heureux et nous battre pour ce que nous avons, sans faire attention à toute cette bande d’aigris qui essaye de nous gouverner.

Merci beaucoup pour ces mots encourageants, nous sommes sûrs que tout finira bien. Merci également pour ton courage face à ces épreuves.

Merci à vous pour le soutien.

Avec plaisir.

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