Interview de Cristina Sánchez - ExpoGrow Irún 2016

Pendant Expogrow Irun 2016, nous avons eu l'opportunité d'interviewer Cristina Sanchez, professeur de biologie moléculaire et biochimie, spécialisée dans l'étude des cannabinoïdes comme agents anti-tumoraux, et secrétaire actuelle de l'Observatoire Espagnol du Cannabis Médicinal. Merci beaucoup Cristina de nous avoir dédié ces quelques minutes!

Transcription de l'interview de Cristina Sánchez:

Les services de santé publique en général et les docteurs en particulier, sont-ils réellement conscients des propriétés médicales des cannabinoïdes et des terpènes ?

En général non, il s’agit d’un manque de connaissance. Souvent ce n’est pas qu’ils ne veulent pas, mais plutôt que personne ne leur en donne la possibilité. Moi, par exemple, je donne des cours à l’Université Complutense et personne n’explique à nos élèves ce qu’est le système endocannabinoide, alors qu’il s’agit d’un système de signalisation très important pour notre organisme.

C’est un problème important auquel nous sommes confrontés, le manque d’information au sein de la communauté médicale, c’est précisément à cause de cela, car personne ne leur a expliqué ce qu’est le système endocannabinoïde, la façon dont il agît, le potentiel thérapeutique de la plante est si grand. Une partie du problème c’est le manque de connaissance des médecins…

Cela est un frein important pour que la thérapie avec des cannabinoïdes puisse être appliquée...

C’est l’un des problèmes, il y en a beaucoup d’autres, Mais le problème majeur c’est le manque d’informations au sein de la communauté médicale.

L’un des objectifs de l’Observatoire Espagnol de Cannabis Medical est précisément celui là, transmettre cette information qui existe, on ne l’invente pas, c’est de l’information scientifique très solide et nous devons la transmettre à la communauté médicale pour qu’ils comprennent que le cannabis est une option thérapeutique intéressante.

Que pensez-vous du Entourage effect, autrement dit, de la synergie entre les cannabinoïdes et les terpènes, et son efficacité par rapport aux éléments isolés ?

C’est un aspect qui est largement décrit et très bien documenté. Quand on travaille avec des composés isolés, avec des cannabinoïdes ou des terpènes isolés, il se produit un effet thérapeutique en particulier, mais si vous jouez avec la combinaison des différents cannabinoïdes et terpènes, il est démontré que les effets sont beaucoup plus importants, cela est tout a fait logique car ce sont de nombreux composés qui agissent sur de nombreuses cibles et cela signifie que l’effet thérapeutique est beaucoup plus importants que celui qu’il peut y avoir en agissant sur des cibles en particuliers, ou sur des cibles individuelles.

C’est comme quand on écoute un violon, la sensation est très agréable, mais si vous écoutez l’orchestre dans son ensemble, la sensation est encore plus plaisante. C’est un exemple pour que vous puissiez comprendre ce qu’est l’effet d’accompagnement dans l’Entourage effect.

Tu as prouvé il y a un moment, que les cellules cancéreuses se suicidaient avec l’application du THC, pour le dire cette façon…

A quelle étape d’avancement se trouve l’étude que vous menez actuellement et vers ou se dirige telle ? C’est profitable pour certain type de thérapie ?

Nous, enfin pas seulement nous, il existe différents groupes dans le monde qui travaillent sur le sujet, nous avons observé que les cannabinoïdes produisent des effets anticancéreux, aussi bien en les utilisant sur des cultures cellulaires, comme sur différents animaux.

A présent nous devons passer par les tests cliniques et dans ce sens il y a quelques recherches en marche dans le monde, l’un au Royaume Unis et l’autre en Israël, et a Madrid, une parte de notre équipe, menée par Guillermo Velasco, Ils essaient de mener d’autres recherches sur des patients atteints de Gioblastome en combinant des thérapies cannabinoïde (THC y CBD) avec le Temolozomide, qui est le médicament donné à ce type de patients.

Nous faisons donc tout notre possible pour que les essaies cliniques aient lieu. C’est difficile car il y a de nombreux obstacles, surtout en relation avec l’argent et avec la régulation exhaustive appliqué sur ces composés. Mais bon, on avance et nous espérons qu’il y aura de nombreux essaies cliniques durant les prochaines années.

Le cannabis s’utilise sous différentes formes, mais tu penses que la plante peut-être utilisée directement pour une thérapie, ou est-il préférable d’isoler les composants pour ensuite réaliser des médicaments et pouvoir traiter ainsi directement n’importe quelle maladies ?

Aussi bien la recherche préclinique que l’information que nous avons des patients, montre que les extractions obtenues de la plante fonctionnent mieux que les composés isolés.

Il existe des expériences avec des composés qui sont légaux aux Etats-Unis par exemple, le Marinol ou le Cesamet qui fonctionne raisonnablement bien, mais jamais aussi bien que la plante dans les pays autorisant le cannabis thérapeutique, nous observons des effets semblables également en préclinique. Quand nous travaillons avec des composés isolés, nous voyons un effet 1 et quand nous travaillons avec la plante ce 1 se convertie en 2.

Nous pouvons aller plus loin que la plante ? Je crois que c’est suffisamment puissant pour…

La plante à plus de 100 cannabinoïdes, des centaines de terpènes, des flavonoïdes et la plupart pour ne pas dire tous, possèdent un effet thérapeutique et une synergie quand ils agissent en combinaison.

Nous pourrions essayer de reconstruire des profils de plantes, des types de plantes, mais je choisirais plutôt l’utilisation de la plante qui possède ces composants et implique une manipulation moindre et je crois également que ce serait beaucoup plus pratique pour les patients.

En fait, cette question était plutôt dirigée vers l’industrie pharmaceutique, qui n’est pas rentré directement dans les cannabinoïdes pour ses thérapies ?

Il y a GW par exemple qui possède le SATIVEX, qui est un extrait de la plante, avec une proportion 1 :1 de THC et CBD, mais il possède d’autres composants de la plante également, mise à part cette exception, il est vrai que les grandes compagnies misent plus sur les composés isolés, des composés dérivés des composés de la plante, plutôt que pour des extraits de la plante.

Dans ce cas et je crois qu’il y a également des intérêts économiques, les plantes peuvent être cultivées dans tous nos jardins, et les huiles nous sommes tous capables de les extraire à domicile.

Je ne dis pas que c’est l’idéal, mais d’un point de vue d’une entreprise pharmaceutique de grande taille, il est très difficile d’entrer en compétition avec cette production à petite échelle. Peut-être que c'est un problème ou un des handicaps pour lesquels les grandes sociétés pharmaceutiques ne s’intéressent pas à ce domaine.

L’un de tes sujet d’étude et qui a été très étudié dernièrement, c’est le cancer du sein, non ?

De plus en plus d’essaies clinique avec de la Metformine pour des cas de Her2+ sont réalisés et ils connaissent une grande réussite… Il y a une possibilité pour que vous, ou votre équipe, développent des projets de recherche clinique avec des cannabinoïdes et le cancer, en particulier pour ce type de maladies ?

Nous aimerions beaucoup… nous aimerions beaucoup. En fait, c’est ce que nous souhaitons faire dans le laboratoire. On continue à faire des recherches précliniques et nous aimerions que quelqu’un nous aide à continuer ce type d’études.

Il manque beaucoup d’argent pour cela, beaucoup d’argent et c’est ce qui nous empêche d’avancer en ce moment, le manque d’argent, et le manque d’intérêt du collectif médical.

Pas tout le monde … mais il y a très peu de gens qui essaient de faire avancer les choses car il n’y a pas de données cliniques, mais il n’y a pas de données cliniques si nous ne générons pas de données cliniques. C’est le serpent qui se mord la queue, cependant le problème fondamental, je crois que c’est le manque d’argent.

C’est étrange non ? On parle durant la présentation du Foro ou de l’Obervatoire de la Californie par exemple où ce sont plus de 20 000 patients qui se traitent avec des cannabinoïdes et il n’y a aucune étude qui démontre, qui prouve ou explique, il n’y a aucun suivi de cela non ?

Oui, hélas toute cette information se perd. On la jette à la poubelle… comme tu l’as dit, il y a des milliers de patients et pas seulement en Californie, dans de nombreuses parties du monde, qui consomment du cannabis à des fins thérapeutiques depuis de nombreuses années.

Personne ne fait de suivi clinique avec ces patients, sauf quelques très rares exceptions, et toute cette information part à la poubelle. Nous devons donc faire notre possible pour essayer de récupérer cette information. Dans certains cas elle est disponible mais personnes ne prend la peine de l’analyser et c’est réellement regrettable car c’est une mine d’or.

Toute cette information est là et nous devrions l’utiliser. Et surtout, les gens qui commencent à présent à traiter des patients ou les personnes des dispensaires ; comme je l’ai dit durant mon intervention ; qui ont des patients-utilisateurs thérapeutique, devraient faire leur possible pour récupérer l’information de ces patients afin de la transformer en données que nous pourrons montrer à la communauté clinique, pour qu’enfin ils puissent voir qu’il s’agit d’une alternative sérieuse.

Il est possible qu’il nous manque des données, c’est pour cela que je vais te demander, par rapport à ton expérience, tu penses qu’il existe une incompatibilité entre le traitement avec des cannabinoïdes et la chimiothérapie classique ou la radiothérapie utilisée actuellement ?

Nous n’avons pas de réponse pour cette question avec des humains, ce que nous avons par contre c’est des preuves préclinique une fois de plus, qui montre justement la direction contraire.

Il y a des études avec des animaux qui montrent que la combinaison des cannabinoïdes et la chimiothérapie fonctionnent mieux que chacune des deux thérapies séparément, et il se passe la même chose avec la radiothérapie.

Il y a des tests qui prouvent qu’en combinant la radiothérapie avec le traitement cannabinoïde, les tumeurs des animaux se développent beaucoup plus lentement, donc comme toujours, cela peut se passer ou non chez les humains mais les données préclinique suggère cela depuis longtemps. Non seulement qu’il n’y a pas d’interaction négative mais que cela pourrait même être une synergie…

Cristina, nous espérons qu’il y aura plus de donné, plus d’études, que de nombreux financement vous soient attribués pour que ces études arrivent jusqu’au bout,

Merci beaucoup pour vos réponses et à bientôt.

---


Il est estimé qu’approximativement 1 femme sur 8 souffrira d’un cancer du sein au long de sa vie…

En Espagne ce sont 26 000 cas par an qui sont diagnostiqués, ce qui représente presque 30% de toutes les tumeurs du sexe féminin dans notre pays.

La majorité des cas sont diagnostiqués entre 35 et 80 ans, pour un maximum entre les 45 et les 65 ans.

Cependant, nous ne disposons pas d’un système national de registre des tumeurs pour connaitre les chiffres exacts.

Chat on Telegram