Entretien avec Jorge Soto (Ananda Lab) durant la Spannabis 2018

Durant la 15ème édition de la Spannabis 2018 de Barcelone nous avons eu la chance de nous entretenir avec Jorge Soto, le directeur de Ananda Lab, une entreprise composée d’experts du cannabis et de ses dérivés qui, avec la collaboration de patients thérapeutiques, ont créé un système de contrôle et d’analyse du cannabis médicinal.

Alchimia souhaite remercier Jorge Soto pour cet entretien réalisé quelques minutes après sa présentation au World Cannabis Conferences. Présent dans le secteur cannabique depuis plus de 20 ans, Jorge Soto nous fait ici un résumé de son projet, nous parle des composants présents sur les plantes de cannabis (cannabinoïdes, terpènes,…) et de l’importance des effets et des propriétés médicinales.

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Transcription de l’entretien de Jorge Soto (Ananda Labs) durant la Spannabis 2018 :

Nous sommes avec Jorge Soto, le directeur d’Ananda Lab, un projet qui a commencé il y a 4 ans, mais Jorge est dans le secteur cannabique depuis 20 ans, comment ça va Jorge?

- Très bien. Je profite de la Spannabis, du meilleur événement actuel en Europe pour le cannabis, aussi bien médical que ludique, je rends visite à des copains, des clients, de futures clients, des collaborateurs et je profite de tout cela, on a la chance de vivre dans ce pays, alors qu’il y a encore peu de temps les «fumeurs de joints» devaient rester enfermés chez eux…

Tu es dans le bain quoi…

- Oui, étonnamment. Et chaque année je suis plus content.

Avant tout, qu’est-ce que Ananda Labs, c’est un laboratoire? Un service de consultation? Un peu tout cela? Que faites-vous avec Ananda?

- Nous sommes simplement un groupe de gens avec un point commun, l’amour de la plante et chaque personne à une spécialité. Je suis un peu celui qui touche à tout, depuis la culture jusqu’au chanvre industriel, des connaissances sur le cannabis thérapeutique, ensuite nous avons notre spécialiste en analyses qui est bien sûr l’activité principale de notre groupe.

Nous réalisons des analyses et des contrôles de qualités de produits cannabinoïdes aussi bien pour les fermes de chanvre industriel que pour les producteurs de CBD. Nous travaillons également avec des groupes pharmaceutiques, des universités, des produits de recherches, nous avons quelques collaborations avec des groupes sans but lucratifs pour pouvoir faire un peu de contrôle de qualité sur ce qui est distribué dans les dispensaires espagnols. Bien entendu la plupart des gens qui viennent vers nous sont déjà dans le monde cannabique et savent qu’ils existent des dispensaires pour acheter du cannabis, acquérir du cannabis, et bien une autre partie des gens ne savent pas qu’il existe ces dispensaires, et nous, à travers un projet sans but lucratif nous essayons de diriger les gens vers ces endroits pour qu’ils traitent leurs problèmes ou simplement pour un usage ludique, pour qu’il puisse savoir ce qu’il consomme et qu’il puisse avoir un projet de «qualité contrasté» a portée de main.

Ce n’est pas la même chose de consommer un coca-cola qui a 300 calories et un coca-cola light qui n’en a pas du tout. Dans n’importe quel produit de consommation humaine que nous avons dans notre frigo, chez nous, nous avons une étiquette, un contrôle de qualité, une série de connaissance de ce produit, quelque chose qui n’existe pas avec le cannabis pour l’instant, et nous à travers nos différentes initiatives, aussi bien au niveau de l’entreprise avec des pharmaceutiques, des développeurs et des cultivateurs de chanvre industriel, mais aussi avec nos initiatives sans but lucratif pour travailler avec des Clubs et des gens de dispensaires.

Exact. Parce que quand on a commencé, il y a 20 ans, on connaissait le THC, parce que quand tu avais un échantillon, c’était plus ou moins fort… un peu une sensation. Aujourd’hui c’est presque impossible qu’une banque sorte une variété sans faire une analyse de cannabinoïdes, mais également de terpènes n’est-ce pas?

- Pour le breeding du cannabis, normalement ça fait longtemps, les gens parlaient d’un breeder de cannabis comme s’il s’agissait d’une éminence et la personne la plus savante… un guru que prenait une plante A et la conservait plusieurs années et réalisait une autre variété grâce à elle, aujourd’hui ce n’est plus aussi élitiste, c’est plus quelque chose de connaissance, de génétique et de développement, comme ce qui se fait avec d’autres plantes et tout ce type d’activités qui ont des outils derrière quand ils se réalisent au niveau professionnel, qui ne s’utilisaient pas avec le cannabis.

C’est normal, avec les tomates on regarde par exemple les pourcentages de lycopène sur une tomate, parce que c’est la donnée qui intéresse le développeur… c’est normal que dans le cannabis on regarde les cannabinoïdes, qui sont les principes actifs. Les cannabinoïdes en plus, comme tu le dis, il y a 20 ans nous disions cela du THC, le THC… on pensait que le THC était ce qui nous affectait, qu’il n’existait rien d’autre. Ensuite on a connu le CBD, on a pensé  que le CBD était ce qui donnait sommeil. Plus tard les scientifiques nous ont expliqué qu’il ne donne pas sommeil, mais simplement qu’il avait des propriétés médicinales et un effet modulateur du THC qui offrait une perception de l’expérience psychoactive différente, l’annulant même parfois.

Et bien tout ce type d’information est très important et aujourd’hui avec les terpènes c’est ce que tu m’as raconté, que ce sont les molécules aromatiques, avant personne ne savait ce qu’était un terpène. Il y a 2 ans, tout le monde comprenait bien que ce qui provoque l’odeur et la saveur caractéristiques de nos variétés favorites de cannabis ce sont ces substances que sont les terpènes, aujourd’hui on sait qu’ils ont une importance cruciale dans l’expérience psychoactive comme sur les effets et les propriétés médicinales de la plante de cannabis...

Oui, oui. Tu disais durant la conférence, la Cheese par exemple, le clone de UK je crois, la Cheese, tout le monde pensait que cette variété était très puissante, elle est entre 15 et 18% de THC. Actuellement nous avons des variétés avec 30% de THC, c’est vraiment fort non?

- Oui, ça l'est.

Ces modulateurs, l’effet entourage avec le CBD et d’autres cannabinoïdes, et les terpènes, ce sont eux qui offrent l’expérience, non?

- Absolument. Tu as parlé de la Cheese d’ailleurs comme je l’ai commenté durant la conférence. La UK Cheese, le fameux clone Exodus, tout le monde la testé, 16% de THC. Il y a des gens qui te disent qu’ils peuvent fumer la Cheese uniquement le soir car après ils vont dormir.

L’effet sédatif du cannabis qui vient principalement, aujourd’hui on le sait, du CBN, est le produit de la dégradation par oxydation et par d’autres types de processus sur le THC qui le convertissent en CBN, c’est ce qui nous donne sommeil, et bien c’est peut-être pour l’influence du THC que les gens pensaient  «non, c’est que je vais dormir pour cela…» et bien non, tu devrais avoir sommeil parce qu’il y a du CBN, mais du CBN?… elle devrait avoir autant de CBN que d’autre variété, elle a le même pourcentage de THC, elle va dégrader la même quantité de CBN. Pourquoi donne-t-elle tellement sommeil? Ce ne serait pas pour les terpènes qui détendent?

En aromathérapie il y a beaucoup de gens qui se massent, il y a peut-être des gens qui disent que tu exagères parce que tu dis: «Les arômes ont des effets». Mais pas seulement les arômes… les couleurs!! si on te met dans une pièce avec les murs rouges tu vas grimper au mur… une pièce de couleur bleue et tu te détends. Les arômes et de nombreuses autres choses ont un effet sur nos plantes et sur nous, c’est donc bien de l’étudier, pour savoir qu’el est le rôle de chacun, quelles sont les synergies, quels effets sont augmentés par les autres. Parce que cela se passe, tu as une substance relaxante et en la mélangeant avec une autre, l’effet relaxant ne s’additionne pas, mais ce multiplie.

Et tout ce type de science est dans le cannabis… bon pour parler franchement c’est encore en développement. Il y a beaucoup d’études, il y a des études qui sortent tous les jours et certains en contredisent d’autres, et je crois que c’est un peu là-dessus que nous devons tous évoluer, connaitre davantage la plante, ou mieux la contrôler, pour pouvoir offrir aux producteurs, aux fermiers, un outil qui marche pour eux et qui apportent plus d’information aux clients et pour être sûr de leurs produits et que toute cette industrie soit un peu plus sérieuse, ce qui existe dans d’autres secteurs et que nous écartons peut être par ostracisme, jusqu’à aujourd’hui c’était quelque chose d’impensable dans ce monde, mais qui peut également être fait, qui est à notre porté, il y a un grand nombre de scientifiques, un grand nombre de gens qui poussent pour que cela avance...  et la science du cannabis est une réalité d’aujourd’hui.

Nous ne sommes pas 4 illuminés qui disons que c’est une médecine et que chaque cannabinoïdes possède ces propriétés. Il y a un grand nombre de substances dans le cannabis et il y en a beaucoup de grand intérêt, pas seulement d’un point de vue ludique mais également médicinal, et c’est très important qu’il y ait des études qui regardent ces choses parce que cela peut être utile pour de nombreuses personnes.

En parlant d’analyse, tu parlais de nombreux composants, mais une chose que tu as dit durant la conférence et qui je crois est très importante et qu’il faut aussi prendre en compte, c’est l’analyse des métaux lourds, des pesticides, comment nous cultivons? Où nous cultivons? Nous voulons du cannabis thérapeutique?

Oui, mais devons savoir s’il y a du mercure, qu’il n’y ait pas de produits nocifs, non? Cela ils te le demandent par exemple quand tu fais des analyses pour les clubs, les banques, les laboratoires?

- Nous avons connu différentes étapes dans le laboratoire. Comme je l’ai commenté dans les conférences nous avons fait beaucoup d’efforts pour essayer de collaborer avec des entités sans but lucratif, avec des associations, pour le contrôle de la qualité plus centrée sur la sécurité du produit, nous étions peut-être dans une étape de l’industrie trop jeunes quand nous avons essayé, nous n’avons pas eu l’accueil que nous espérions.
Il faut aussi comprendre que ce n’est pas obligatoire, que ce type d’entités ont parfois une chose, parfois une autre… souvent il y a un peu de désorganisation. Je crois que l’évolution de l’industrie ces 3 dernières années est arrivé à un point ou si on essaie de le bouger, il y a plus de gens conscients avec ce type de chose, qui au final sont positifs pour eux parce que cela se répercute positivement sur l’image de l’industrie, c’est positif pour les patients parce que cela se répercute positivement sur la santé et je crois à présent que ce sera quelque chose de plus accepté, et que, petit à petit deviendra quelque chose d’obligatoire, je ne sais pas si d’un point de vue légale, mais depuis un point de vue moral au moins...

Oui, si on aime manger des tomates et salades biologique, le cannabis aussi, non?

- Tout à fait. C’est la mode à présent d’aller au Carrefour pour payer 5 fois plus cher pour une tomate parce qu’ils te garantissent qu’ils n’ont pas mis de pesticides et qui va te couter 4 bras, 3 jambes et après nous volerons… Pourquoi cela n’existerait-il pas avec un produit que nous ne consommons pas seulement, mais que nous inhalons ou brûlons?

C’est quelque chose que je répète toujours, c’est un produit de consommation humaine, mais c’est un produit de consommation humaine qui se fume, c’est encore pire. Il faut comprendre que n’importe quel produit que nous consommons en fumant est nocif pour notre organisme, parce que nous le fumons, parce que fumer c’est respirer de la fumée et ce n’est pas bon et si ce produit en plus comporte une série de composants, que ce soit des métaux lourds, des restes de pesticides en quantités qui ne sont pas sûr et bien, c’est préférable de le savoir, de savoir à ce que nous nous exposons pour prendre une décision de savoir si nous souhaitons consommer ou pas…

C’est ce qui est très important je crois. Jorge, merci beaucoup pour ton temps, merci beaucoup pour tes explications sur les analyses et sur le cannabis en particulier, à bientôt.

- Enchanté. Merci beaucoup.

Avec plaisir.

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